La Résurrection de notre Seigneur Jésus-Christ

Publié le par lepontdusalut

La Cité Mystique de Dieu

 

CHAPITRE XXVI.

 

La résurrection de notre Sauveur Jésus-Christ, et son apparition à sa très-sainte Mère avec les saints Pères des limbes.

 

Marie d’Agréda dit sous l’Inspiration du Ciel :

 

L'âme très-Sainte de notre Rédempteur Jésus-Christ demeura dans les Limbes depuis les trois heures et demie du vendredi au soir jusqu'aux trois heures du matin du dimanche suivant. Alors elle retourna victorieuse au sépulcre, accompagnée des mêmes anges qui l'escortaient dans sa descente aux Limbes, et des saints qu'Elle tira de ces prisons souterraines, comme les dépouilles que sa Victoire lui avait acquises et les trophées de son glorieux Triomphe, laissant ses ennemis rebelles dans l'abattement et l'effroi. Il y avait au sépulcre beaucoup d'autres anges qui le gardaient pour faire honneur au Sacré Corps uni à la Divinité. Et quelques-uns d'eux avaient recueilli par l'ordre de leur Reine les reliques du Sang que son très-Saint Fils versa, les lambeaux de Chair qu'on lui fit tomber de ses plaies, les cheveux qu'on lui arracha, et tout le reste qui contribuait à la parfaite intégrité de son Humanité Sainte ; la très-prudente Mère songea à tout. Les anges gardaient précieusement ces reliques, chacun d'eux s'estimant fort heureux de la part qui lui était échue.

 

En premier lieu les saints Pères virent le Corps de leur Rédempteur tout blessé, déchiré et défiguré par la cruauté des Juifs. Les patriarches, les prophètes et tous les autres saints Le reconnurent dans ce pitoyable état, L'adorèrent et déclarèrent de nouveau que le Verbe incarné s'était véritablement chargé de nos infirmités et de nos douleurs, et qu'Il avait surabondamment payé notre dette et satisfait à la Justice du Père Eternel pour ce que nous avions mérité, étant Lui-même très-innocent et sans aucun péché. C'est là où nos premiers parents, Adam et Ève, apprécièrent les ravages que leur désobéissance avait causés dans le monde, combien en avait coûté la réparation, et l'immense Bonté, la Miséricorde infinie du Rédempteur. Les patriarches et les prophètes virent accomplies leurs prédictions et les espérances qu'ils avaient eues dans les promesses du Très-Haut. Et comme ils sentaient en la gloire de leurs âmes l'effet de la Rédemption abondante, ils en louèrent de nouveau le Tout-Puissant et le Saint des saints, qui l'avait opérée avec un ordre si merveilleux de sa sagesse.

 

Les auges restituèrent ensuite au Corps Sacré toutes les reliques qu'ils avaient recueillies, le rétablissant dans son intégrité naturelle, et cela se fit en présence de tous les saints qui étaient sortis des Limbes. Au même instant l’âme très-Sainte du Seigneur se réunit à son Corps, et lui donna la Vie et la Gloire immortelle. Et quittant le linceul et les parfums avec lesquels on L’avait enseveli, Il fut revêtu des quatre dons de gloire, de clarté, d’impassibilité, d’agilité et de subtilité. Ces dons rejaillirent de la Gloire immense de l'âme de notre Seigneur Jésus-Christ sur son Corps déifié. Et quoiqu'il eût dû les recevoir au moment même de la conception, comme un apanage et comme une attribution naturelle, puisque dès lors son âme très-Sainte fut glorifiée, et que toute cette humanité très-innocente était unie à la Divinité, il est vrai qu'ils furent alors suspendus et ne rejaillirent point sur le sacré Corps, afin que restant passible, Il put nous mériter notre gloire en se privant de celle de son Corps, ainsi que je l'ai dit ailleurs. Mais en la résurrection ces Dons lui furent rendus avec Justice, dans le degré et dans la proportion qui répondaient à la gloire de l'âme et à l'union de l'âme avec la Divinité. Et comme la Gloire de l'âme très-Sainte de notre Sauveur Jésus-Christ est incompréhensible et ineffable, de même il est impossible de bien exprimer par nos faibles paroles et par aucun exemple la Gloire et les Dons de son Corps déifié, car par rapport à sa Pureté le cristal est obscur. La Clarté dont il resplendissait surpasse celle des autres corps glorieux, comme le jour surpasse la nuit, et plus que l'éclat de mille soleils ne surpasserait celui d'une seule étoile ; et parvint-on à réunir en une seule créature les beautés de toutes les autres, elle paraîtrait difforme auprès de Lui. Aussi n’y a-t-il rien en tout ce qui est créé qui puisse lui être comparé.

 

L'excellence de ces Dons surpassa de beaucoup en la Résurrection la gloire qu'ils communiquèrent en la transfiguration et en d'autres occasions où notre Seigneur Jésus-Christ se transfigura, comme on l'a vu dans le cours de cette histoire ; car alors Il la reçut en passant et proportionnellement à la fin pour laquelle Il se transfigurait. Mais en la Résurrection Il l'eut avec plénitude pour en jouir éternellement. Par l'impassibilité, le Corps sacré devint inaltérable. Par la subtilité, Il fut tellement purifié de ce qu'Il avait de terrestre qu'Il pouvait pénétrer les autres corps sans aucune résistance, comme s'Il eût été un pur esprit ; et c'est ainsi qu'Il pénétra la pierre du sépulcre sans la déplacer et sans la briser, en la manière dont il était sorti du sein virginal de sa très-pure Mère. L'agilité L'affranchit du poids de la matière au point qu'Il surpassait la libre activité des anges ; et Il pouvait par Lui-même se transporter plus rapidement qu'eux d'un lieu à un autre, comme Il le fit quand Il se montra aux apôtres et en d'autres occasions. Les sacrées plaies qui Le défiguraient auparavant parurent aux pieds, aux mains et au côté si brillantes, qu'elles rehaussaient sa Beauté ravissante comme du trait caractéristique le plus admirable. Notre Sauveur sortit du sépulcre revêtu de toute cette Beauté et de toute cette Gloire.

 

Et en présence des saints et des patriarches qu'Il avait tirés des limbes, il promit à tout le genre humain la résurrection universelle, comme un effet de la sienne, en la même chair et dans le même corps de chacun des mortels ; et aux justes leur future glorification dans leur chair et dans leur corps. Pour gage de cette promesse de la résurrection universelle, sa Divine Majesté ordonna aux âmes de beaucoup de saints qui se trouvaient présentes, de s'unir à leurs corps et de les ressusciter à une vie immortelle. Cet Ordre Divin fut aussitôt exécuté, et alors eut lieu la résurrection des corps dont saint Matthieu prévenant le mystère fait mention dans son Évangile : entre autres, ceux de sainte Anne, de saint Joseph, de saint Joachim et de quelques anciens Pères et patriarches qui se distinguèrent le plus en la foi et en l'espérance de l'Incarnation, et qui la demandèrent avec le plus d'ardeur au Très-Haut. Et en récompense de leur ferveur et de leurs saints désirs, ils obtinrent par avance la résurrection et la gloire de leurs corps.

 

Oh ! Combien ce Lion de Juda, ce Fils de David paraissait déjà puissant, admirable, victorieux et fort ! Jamais personne ne sortit du sommeil aussi vivement que Jésus-Christ de la mort. A sa Voix impérieuse, les ossements desséchés et dispersés de ces vieux morts se rapprochèrent aussitôt, et la chair qui était réduite en poussière se renouvela et s'unit aux os pour reconstituer son Etre primitif, mais perfectionné par les Dons de Gloire que le corps reçut de l'âme glorifiée qui lui donna la vie. Tous ces saints ressuscitèrent dans un instant avec leur Rédempteur, et parurent plus clairs et plus resplendissants que le soleil ; beaux, transparents, légers, capables de Le suivre partout; et par leur bonheur ils nous ont confirmés dans l'espoir que nous verrions notre Rédempteur dans notre propre chair, et que nous Le contemplerions de nos propres yeux comme Job l'a prédit pour notre consolation. La grande Reine du Ciel pénétrait tous ces mystères, et y participait par la vision qu'elle avait dans le Cénacle. Au moment même où l'âme très-Sainte de Jésus-Christ entra dans son corps et lui donna la vie, celui de sa très-pure Mère reçut la joie qui était suspendue dans son âme jusqu'à la résurrection de cet adorable Seigneur, comme je l'ai dit dans le chapitre précédent. Ce bienfait fut si excellent, qu'elle en fut toute transformée, et elle passa incontinent de la désolation où elle était à une céleste consolation, et de la tristesse à  une joie ineffable. Il arriva que dans cette circonstance l'évangéliste saint Jean l'alla voir pour la consoler dans son amère solitude, comme il l'avait fait le jour précédent ; mais il fut agréablement surpris de trouver entourée des splendeurs de la gloire Celle qui naguère était presque méconnaissable à cause de son affliction. Le saint apôtre l'ayant considérée avec admiration et avec un profond respect, crut que le Seigneur devait être déjà ressuscité, puisque sa divine Mère recevait tant de consolation qu'elle en était toute renouvelée.

 

Par cette nouvelle joie et par, les opérations si Divines que l'âme de notre auguste Princesse produisait dans la vision de tous ces mystères si sublimes, elle commença à se disposer à la prochaine apparition de son Fils ressuscité. Et au milieu des cantiques de louanges et des prières quelle faisait, elle sentit tout à coup, outre la joie qu'elle avait, quelque chose d'extraordinaire, je ne sais quelle consolation céleste, qui répondait d'une manière merveilleuse aux douleurs et aux peines intérieures qu'elle avait souffertes dans la Passion; ce bienfait était tout différent et fort au-dessus de la joie qui rejaillissait de son âme sur son corps comme un écoulement naturel. Après ces admirables effets, elle reçut une autre grâce qui lui fit goûter des faveurs Divines qui étaient toutes nouvelles. Alors elle sentit s'opérer en elle une nouvelle infusion de sentiments et de lumières qui précèdent la vision béatifique, et que je ne décris point ici, parce que je l'ai déjà fait lorsque j'ai traité de cette matière dans la première partie. J'ajoute seulement que notre incomparable Reine reçut ces bienfaits dans cette occasion d'une manière plus excellente et avec plus d'abondance que dans les autres rencontres, parce que la Passion de son très-Saint Fils et les mérites qu'elle y acquit avaient précédé, et son Fils tout-puissant lui donnait une consolation qui répondait à la grandeur des peines qu'elle avait souffertes.

 

La bienheureuse Marie étant ainsi préparée, notre Sauveur Jésus-Christ ressuscité et glorieux entra accompagné de tous les saints et de tous les patriarches qu'il avait tirés des limbes. La très-humble Reine se prosterna et adora son très-Saint Fils, et le Seigneur la releva lui-même. Et par cette faveur, beaucoup plus grande que celle que demandait la Madeleine en souhaitant toucher les sacrées plaies de Jésus-Christ, la Mère Vierge reçut un bienfait extraordinaire qu'elle seule put mériter comme exempte de la loi du péché. Et quoique ce ne fût pas le plus grand de ceux dont elle fut favorisée dans cette occasion, elle n'eût pas été capable de le recevoir si elle n'eut été soutenue par les anges et fortifiée par le Seigneur Lui-même, afin de ne point tomber en défaillance. Ce bienfait consista en ce que le corps glorieux de Jésus-Christ pénétra celui de sa très-pure Mère, qui devint tout éclatant, comme si un globe de cristal renfermait le soleil, qui le remplirait de splendeur et de beauté par sa lumière. C'est ainsi à peu près que  le corps de l'auguste Marie fut uni à celui de son adorable Fils par le moyen de cette divine pénétration, qui fut pour elle comme une voie pour arriver à la connaissance de la gloire de l'âme et du Corps du même Seigneur. Par ces faveurs, comme par autant de degrés de Dons ineffables, notre grande Reine s'éleva à la contemplation des mystères les plus sublimes. Parvenue à ces hauteurs, elle entendit une voix qui lui disait :

« Ma bien-aimée, montez encore, montez plus haut ».

 

En vertu de cette Voix, elle fut toute transformée et vit la Divinité d’une vue claire et intuitive, dans laquelle elle trouva le repos et pour quelques moments au moins la récompense de toutes ses peines. Il faut forcément garder ici le silence, puisque les paroles nous manquent pour exprimer ce qui se passa à l'égard de la très-pure Marie dans cette vision béatifique, qui fut la plus haute et la plus Divine de celles dont elle avait été privilégiée jusqu'alors. Célébrons ce jour avec des cantiques de louanges, avec des transports d'admiration, avec des congratulations, avec amour et avec d'humbles actions de grâces de ce qu'elle fut si exaltée, de ce qu'elle nous mérita à nous, et de ce dont elle jouit elle-même. Notre auguste Princesse jouit pendant quelques heures de l'être de Dieu avec son très-Saint Fils, et participa à sa Gloire comme elle avait participé à ses douleurs. Ensuite elle descendit de cette vision par les mêmes degrés par lesquels elle y était montée ; et à la fin de cette faveur elle fut de nouveau appuyée sur le Bras gauche de la très-Sainte Humanité, et caressée en une autre manière de la Droite de la Divinité. Elle eut de très-doux entretiens avec son adorable Fils sur les sublimes mystères de sa Passion et de sa Gloire. Et dans ces entretiens elle fut de nouveau enivrée du vin de la Charité et de l'Amour, qu'elle but sans mesure à sa propre Source. Elle reçut abondamment dans cette circonstance tout ce qui pouvait être accordé à une simple créature, comme si la Divine équité avait voulu, selon notre manière de concevoir, réparer pour ainsi dire l'injure (je me sers de cette expression , parce que je ne saurais mieux m'expliquer) qu'avait reçue une créature si pure et exempte de toute tache, en souffrant les douleurs et les tourments de la Passion, qui ,ainsi que je l'ai dit plusieurs fois, étaient les mêmes que notre Sauveur Jésus-Christ endura ; et dans ce mystère la joie de la divine Mère répondit aux peines qu'elle avait souffertes.

 

Après avoir été comblée de toutes ces faveurs, elle s'adressa, tout en restant dans un état très-sublime, aux saints patriarches et aux justes qui accompagnaient le Sauveur ; elle les reconnut tous et parla à chacun selon son rang, se réjouissant de leur sortie des Limbes, et louant le Tout-Puissant de ce que sa Miséricorde libérale avait opéré en chacun d'eux. Elle s'entretint particulièrement avec ses parents, saint Joachim et sainte Anne, avec sou époux Joseph et avec saint Jean-Baptiste. Ensuite elle parla aux patriarches, aux prophètes et à nos premiers parents Adam et Eve. Ils se prosternèrent tous aux pieds de notre auguste Princesse, et la reconnurent comme la Mère du Rédempteur du monde, pour la cause de leur remède, et la Coadjutrice de leur rédemption; et comme telle ils voulurent, conformément aux dispositions de la Divine Sagesse, l'honorer d'un digne culte de vénération. Mais la Reine des vertus et la Maîtresse de l'humilité se prosterna elle-même, et rendit aux saints l'honneur qui leur était dû, et le Seigneur le permit, parce que les saints, quoiqu'ils fussent inférieurs en la Grâce, étaient supérieurs en l'état de bienheureux qui leur assurait à jamais la gloire éternelle, et que la Mère de la Grâce, encore voyageuse sur la terre, n'était point su nombre des compréhenseurs. Cet, entretien avec les saints Pères se prolongea en présence de notre Sauveur Jésus-Christ. Et la très-pure Marie convia tous les anges et tous les saints qui y assistaient, à louer le Triomphateur de la mort, du péché et de l'enfer, et ils Lui chantèrent tous des cantiques nouveaux, des psaumes et des hymnes de gloire. Ensuite le Sauveur ressuscité fit les autres apparitions que je rapporterai dans le chapitre suivant.

 

Instruction que la bienheureuse Vierge Marie m'a donnée.

 

Ma fille, réjouissez-vous dans la peine où vous êtes, de ce que vous ne sauriez exprimer par vos faibles paroles ce que vous concevez des ineffables mystères que vous venez d'écrire. C'est une victoire que le Très-Haut remporte sur la créature, et sa Divine Majesté trouve sa gloire à entendre cette même créature se déclarer vaincue par la grandeur de mystères aussi sublimes que ceux-ci ; car on en pénétrera fort peu tant que l'on vivra dans une chair mortelle.

 

Je sentis toutes les peines de la Passion de mon très-saint Fils, et quoique je ne perdisse point la vie, j'expérimentai néanmoins d'une manière mystérieuse les douleurs de la mort, et à ce genre de mort correspondit en moi une autre admirable et mystique résurrection à un état plus élevé de grâce et de célestes opérations. Et comme l'Etre de Dieu est infini, à quelques communications que la créature soit appelée, il lui en reste toujours davantage à connaître, à aimer, à posséder. Mais afin que vous puissiez découvrir dès maintenant quelque chose de la Gloire de notre Seigneur Jésus-Christ, de la mienne et de celle des saints, en vous servant du raisonnement et des notions que vous avez sur les dons du corps glorieux, je veux vous donner une règle par laquelle vous pourrez passer à ceux de l'âme. Vous savez déjà que ceux-ci sont : la vision, la compréhension et la jouissance. Ceux du corps sont ceux que vous avez indiqués : la clarté, l'impassibilité, la subtilité et l'agilité.

 

A tous ces dons correspond une certaine augmentation pour la plus petite action méritoire que fait celui qui est en état de grâce, quand ce ne serait que remuer une paille ou donner un verre d'eau pour l'amour de Dieu. La créature recevra pour la moindre de ces actions, lorsqu'elle sera bienheureuse, une plus grande clarté que celle de plusieurs soleils. Dans l'impassibilité, elle sera plus à l'abri de la corruption humaine et terrestre que tous les efforts et toutes les précautions des puissants de la terre ne sauraient les défendre de ce qui peut leur nuire on altérer leur état. Dans la subtilité elle est au-dessus de tout ce qui peut lui résister, et elle exerce un nouvel empire sur tout ce qu'elle veut pénétrer. Enfin dans le don d'agilité elle obtient pour la moindre action méritoire une plus grande activité pour se mouvoir que celle qu'ont les oiseaux, les vents et les créatures les plus actives, comme le feu et les autres éléments pour tendre à leur centre naturel. Par l'augmentation que l'on mérite dans ces dons du corps, vous comprendrez celle dont sont susceptibles les dons de l'âme, auxquels les premiers correspondent et desquels ils dérivent. Car l'on reçoit dans la vision béatifique, pour le moindre mérite, de plus grandes lumières et une plus profonde connaissance des attributs et des perfections de Dieu, que toutes les lumières qu’aient jamais pu avoir, et que toute la connaissance qu'aient jamais pu acquérir dans la vie mortelle tons les docteurs de l'Église. Il y a aussi une augmentation dans le don de compréhension à l'Objet Divin ; car de la certitude inébranlable avec laquelle le juste comprend ce bien infini, résulte pour lui un sentiment de sécurité et de nouvelle satisfaction plus digne d'envie que tout ce que les créatures ont de plus précieux, pût-il le posséder sans crainte de le perdre. Dans le don de jouissance, qui est le troisième de l'âme, il est accordé au juste dans le ciel, en récompense de l’amour avec lequel il fait une minime bonne oeuvre, des degrés d'amour de jouissance si excellents, que cette augmentation surpasse tout ce qui est capable d'attirer l'affection et les désirs des hommes dans la vie passagère; et les délices qu'elle procure sont telles, qu'il n'y a rien dans le monde qui puisse lui être comparable.

 

Élevez maintenant votre esprit, ma fille, et, après avoir apprécié les récompenses si merveilleuses qui sont réservées à la moindre action faite pour Dieu, jugez quelle est la récompense des saints qui pour l'amour du Seigneur ont fait les choses si héroïques et souffert les supplices si cruels que vous raconte l'histoire de l'Église. Et si cela arrive chez les saints qui sont de simples mortels sujets à des péchés et à des imperfections qui diminuent le mérite, considérez avec toute l'attention possible quelle doit être la gloire de mon très-Saint Fils, et vous sentirez combien l'intelligence humaine est incapable, surtout dans la vie passagère, de comprendre dignement ce Mystère, et de se former une juste idée d'une grandeur si immense. L'âme très-Sainte de mon Seigneur était substantiellement unie à la Divinité en sa Personne Divine, et par l'union hypostatique il fallait que l'océan infini de cette même Divinité lui fût communiqué, la béatifiant comme celle à qui elle avait communiqué son propre être de Dieu d'une manière ineffable. Mais si son âme n'a pas acquis par ses mérites cette gloire qui lui fut donnée dès l'instant de sa conception dans mon sein en vertu de l'union hypostatique, les oeuvres qu'il fit ensuite durant l'espace de trente-trois ans, naissant dans la pauvreté, vivant dans les fatigues, aimant, pratiquant comme voyageur toutes les vertus, prêchant , souffrant, méritant, rachetant tout le genre humain, établissant l'Église et tout ce que la Foi Catholique enseigne; ces oeuvres, dis-je, méritèrent la Gloire de son Corps sacré, et cette Gloire correspondait à celle de son âme; tout cela est incompréhensible, magnifique, immense, la manifestation en est réservée pour la Vie éternelle. Et par rapport à mon adorable Fils, le puissant bras du Très-Haut opéra de grandes choses en moi, simple créature que j'étais; de sorte que j'oubliai aussitôt les douleurs que j'avais eues. Il en arriva de même aux Pères des Limbes, et il en arrive encore de même aux autres saints quand ils reçoivent la récompense. J'oubliai toutes mes afflictions, parce que la joie inexprimable que je ressentais excluait la peine ; mais je ne perdis jamais le souvenir de ce que mon Fils avait souffert pour le genre humain.

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